Le temps semblait suspendu. La pleine lune, nimbée de sang, luisait, trouble, sur un horizon indistinct. Des écharpes d’un brouillard monté de la rivière marécageuse obscurcissait d’avantage les lieux. On entendait que le hululement sinistre d’un oiseau nocturne et le coassement lointain des grenouilles. La nuit était obscure : seul l’astre lunaire projetait ses faibles rayons au travers les nuages qui s’étalaient dans le ciel. Le hurlement d’un loup trembla alors, ajoutant à l’irréel du silence.
Il tremblotait, haletant, les battements de son cœur résonnant dans ses oreilles. Sa respiration se calma, ses palpitations cardiaques aussi. Il scrutait les alentours d’un regard circonspect, tenant fermement son arc d’une main. Son carquois, faiblement garni, se balançait au bout d’un ceinturon trop grand pour sa carrure d’enfant. À première vue, on ne pouvait dire s’il s’agissait bien d’un homme ou d’un gamin de douze ans. Il était efféminé, petit et se perdait dans des vêtements d’adulte.
Un bruissement le fit sursauter et il émit une interjection de peur en se retournant. Il redressa la tête et vit alors les yeux jaunes et lumineux d’un hibou. Celui-ci prit son envol dans un battement d’ailes à peine audible et disparut.
Son souffle se régularisa puis il se terra à nouveau derrière un bosquet mort, dépouillé de toutes ses feuilles. Ce qu’il attendait se produisit enfin. Trois hommes à la peau nacrée s’engagèrent sur le sentier. Ils ne portaient ni de torche, ni de lampe à huile. S’il les a repérés, c’est qu’ils parlaient avec animation : chose étrange, pour des Nargoliths... Il s’apprêtait à se relever quand deux mains le prirent par les épaules pour le retourner de force. Il n’eut le temps de couiner qu’il se retrouva face à un éclaireur nargolith. La menace de son poignard lui fit lâcher son arc et le maintint gentiment immobile. Un sourire méchant aux lèvres, l’homme le redressa d’une bonne poigne. Le petit être gémit puis recula craintivement, mais il fut retenu par le poignet.
Les trois Nargoliths vinrent l’entourer, comme s’ils auraient su sa présence dès le début.
-Mmhh qu’avons-nous là?
-C’est un kheijan, répondit celui l’ayant capturé.
Leurs lèvres éclatèrent en rires moqueurs. Le captif essaya de se libérer d’une secousse, gémissant. Il n’eut en réponse qu’un coup dans les côtes, asséné par le troisième Nargolith. La plainte qu’il poussa était aiguë, typiquement féminine.
-Qu’est-ce que c’est? Un enfant? demanda le deuxième.
L’éclaireur lui arracha sèchement le foulard qui gardait son identité clandestine. Son sourire s’évanouit devant la magnifique frimousse, qui appartenait, en toute évidence, à une jeune femme. Il la tourna pour la dévoiler aux trois autres, qui se remirent à rire.
-Ooh! C’est une femme! fit l’un d’eux, faussement attendri.
L’éclaireur, tant qu’à lui, ne trouvait pas la situation amusante. Il lui pressa le poignet et la secoua brutalement.
-Qu’est-ce que tu viens faire à la passe des cent pointes, petite garce?!
-Elle s’est peut-être perdue, plaisanta l’un des Nargoliths de sa voix nasillarde.
Il se rapprocha d’elle, souleva son menton saillant pour examiner les traits idylliques de son minois. De la poussière le noircissait et ses grands yeux sombres, qui exprimaient la peur, étaient fardés de noir. Elle ressemblait à un petit animal indomptable et farouche, sa poitrine se soulevant sous sa respiration accélérée. L’éclaireur intervint.
-Nous devrions la livrer au chef, il décidera si elle mérite notre grâce ou una. Mais avant, j’aimerais savoir ce qu’elle vient faire ici.
Suite à ses dires, il la tira vers lui et avec sa dague, exerça une légère pression sous sa gorge.
-Qui es-tu et que viens-tu faire ici?
Elle prit du temps à répondre, baissant les yeux en démonstration de soumission.
-Je suis Farah et je suis venue voir Themys…
Les quatre Nargoliths se consultèrent du regard…
[Bon valà j'écris ça pour intégrer mon personnage dans l'Illégalité, il y aura peut-être une suite, mais ça serait cool que Ystère participe ^^]
Sam 2 Juin - 15:39